Rencontres photographiques de ViaSilva #4

Métro ViaSilva

En vous promenant à ViaSilva, vous aurez l’occasion d’admirer le travail d’Alessia Rollo et de François Lepage. 20 panneaux présentent 10 œuvres de chacun des artistes, tandis qu’un bardage réalisé par notre mécène Réalités compte 4 photographies monumentales.

Alessia Rollo 

La photographe italienne donne à voir une histoire qu’elle a construite durant sa résidence, au fil de ses escapades à ViaSilva et de ses rencontres avec les habitant·es et les acteur·rices du chantier. Ce récit remet au goût du jour le mythe de la Création et reprend l’architecture de son ouvrage, Un jour sans fin

Tout commence de nuit, bien avant le petit matin. Les lumières serpentent entre les arbres, illuminant les brindilles et attirant la moindre petite bête passant par là. Alessia Rollo s’amuse. Elle joue avec le paysage, y inclut des éléments qui le redessinent ou mettent en avant certains détails que le regard de l’artiste a su saisir. Elle les éclairent de ses néons colorés jusqu’au levé du jour, qui effacera leur impact, enchanteur mais éphémère. 

Le soleil pointe le bout de son nez, il traverse les branchages et se pose doucement sur les visages de ViaSilva. Chacun ouvre les yeux pour poser son regard sur le chantier qui prend place de l’autre côté de la palissade. Les habitant·es vivent au quotidien avec les travaux, ils font partie intégrante de leur quotidien et chacun influe sur l’autre dans un équilibre qui se travaille au jour le jour. Tout comme l’artiste, il.elles flânent sur ce territoire et jouent avec les trouvailles qui entourent leur maison, des babioles colorées qui se font accessoires le temps d’un cliché.

En continuant sa course dans le ciel, le soleil dessine sur le sol. Ombre et lumière transcendent les gravas pour les transformer en nuage. « Tu vois des rochers, je vois des nuages ». Alessia Rollo, de son regard enfantin et poétique, nous montre des choses que nos yeux ne sauraient voir. Ces cailloux, ce goudron fissuré, forment un tout et si l’on se penche un peu dessus, en oubliant ce qu’ils sont concrètement, on peut y voir tout un tas de choses. Ils deviennent des lignes traçant sous nos yeux des histoires à lire ou à regarder. La lumière met au jour des babioles, trouvailles tout à fait classiques sur un chantier, qui s’assemblent pour se transformer en monuments éphémères, tel un jeu de construction de notre enfance.

Mais si le soleil met en avant certaines forment, l’ombre qu’il façonne dissimule certaines personnes. Les acteur·rices du chantier sont éphémères à ViaSilva. Alessia Rollo le sait, et c’est ce qu’elle veut transmettre en les photographiant ainsi, sur le point de disparaître, caché dans l’ombre des architectures qu’il·elles construisent.

Le jour semble ne pas se terminer. C’est un jour sans fin, une Création qui semble s’éterniser bien que, parfois, un bâtiment sorte de terre en deux temps trois mouvements. C’est un processus en cours que l’artiste nous dévoile. Elle nous raconte ce chantier, qui n’est finalement qu’un moment, une journée, aussi longue soit-elle. Ce qu’elle nous montre est éphémère, voué à changer, car la vie est ainsi faite, tout est en perpétuelle transformation. « J’ai aussi compris que la vie n’est pas si différente d’un chantier : compliqué, chaotique… Et toujours en progrès ! »

François Lepage

En résidence-mission dès janvier 2020, François Lepage s’est rendu sur de nombreux chantiers de ViaSilva durant toute cette année, malgré la pandémie. Il est allé à la rencontre des ouvrier·ères, a échangé avec eux·elles et observé les travaux. En résulte un ensemble de photographies qui couvrent avec un œil à la fois documentaire et plastique, une partie du quotidien de ces travailleur·euses de ViaSilva.

Bien que le photographe se soit ouvert à d’autres thématiques, il a décidé de centrer cette exposition au métro de ViaSilva sur ce qui entoure justement ce lieu : les chantiers. Au centre de ses images, on trouve des palettes, de la poussière, des fers à béton pris dans la matière déjà sèche ou posés en tas, à même le sol, des engins et surtout des ouvrier·ères. Ces acteur·rices de ViaSilva sont là au quotidien, ce sont eux qui érigent les bâtiments, qui les construisent et qui permettront à des milliers de personnes de venir vivre sur ce territoire. 

François Lepage montre ici une grande variété de techniques, malgré une thématique commune. C’est d’ailleurs ce qui fait la richesse de cette exposition. Pour nous faire part de son expérience du chantier, il utilise la photographie numérique, ainsi que le sténopé. Ses choix de cadrage et de lumière diffèrent pour mettre à chaque fois en avant ce qui lui semble importer le plus sur le chantier. 

On y retrouve notamment deux figures de plein pied, portraits d’ouvriers sur leur lieu de travail, juxtaposés à des images du chantier, comme pour figurer que ce sont bien eux qui permettent l’aboutissement de ces projets. Ils perdent alors leur statut d’anonymes que l’on aperçoit vaguement entre deux palissades. Ici, ils sont au centre de l’action, des individus que le photographe met en avant pour marquer leur importance.

Ces photographies nous montrent le chantier sous plusieurs aspects. François Lepage prend soin de bien choisir ses cadrages pour marquer au mieux la réalité des travaux : en plongée comme pour marquer que les bâtiments s’érigent et se destinent à monter vers le ciel, à travers des grillages qui font office de fenêtres temporaires ou encore de grands angles pour révéler ces pièces vides qui bientôt accueilleront employé·es et habitant·es. 

Plus encore, certaines images mettent en avant la recherche constante d’équilibre qui habite le chantier de ViaSilva. L’utilisation du sténopé, qu’il soit argentique ou numérique, fait écho à la notion d’homéostasie qui intéresse l’artiste. Ce terme, issu du domaine des sciences désigne un processus de régulation à l’intérieur d’un système, permettant à ce dernier de maintenir son équilibre en lui-même. Ces photographies, résultant de ses recherches sur l’homéostasie, montrent en effet comme un écosystème, refermé sur lui-même parvenant à s’équilibrer. Les motifs se soutiennent les uns les autres pour ne former qu’un dans une certaine harmonie. 

Ce travail photographique que François Lepage a mené à l’endroit même des travaux, sur le territoire de ViaSilva, met en avant ces différents aspects du chantier, ainsi que les acteur·rices qui y participent. Cette série est complétée par une image, un reflet dans une fenêtre. L’ombre d’un feuillage se superpose à un bâtiment, le métro de ViaSilva, comme un clin d’oeil à cette urbanisation qui s’accroît et aux changements qui animent le territoire. Ce chantier est la lisière entre deux mondes : l’espace urbain et l’espace rural. 

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Vues d’expo © Alessia Rollo