Comme seul

Denis Orhant, Pascale Borrel, Angélique Lecaille,

Bruno Di Rosa et Jérémy Le Corvaisier

Exposition du 7 décembre 2021 au 18 février 2022
Galerie Net Plus 

 

Cet hiver, l’association Les ailes de Caïus accueille une exposition collective orchestrée par Denis Orhant. Le peintre a invité quatre artiste rennais à exposer avec lui, l’occasion d’une belle rencontre entre leurs cinq univers graphiques et picturaux.

 

Un dialogue

Écritures abstraites et figuratives se côtoient dans l’espace d’exposition, parfois dans une seule et même œuvre. La couleur fait face au noir et blanc, la peinture à l’huile fréquente le graphite et la mine de plomb.

Ces différentes pratiques, volontairement choisies par Denis Orhant, se font écho et offrent une certaine cohérence malgré leur diversité. Les pièces communiquent entre elles, se complètent et s’agacent, créant un ensemble et une ambiance qui invite le spectateur à prendre le temps d’explorer l’espace d’exposition et de se plonger dans les œuvres.

Denis Orhant, en pensant l’exposition, a refusé de donner une thématique ou une ligne directrice aux artistes invités. « Comme seul » a pour ambition de montrer la diversité des pratiques de ces artistes, et malgré tout, il se dégage une ambiance particulière et intrigante, façonnée par les échanges entre les œuvres.

 

« Les peintures, les dessins sont là, sans négociation entre eux, c’est cela qui est intéressant. Ils se côtoient, peuvent être en vis-à-vis aussi. Le doré, la couleur, le noir se rencontrent. Les figures de différentes natures dialoguent. Cela se fait naturellement. »1

Cliquez sur l’image pour accéder à l’exposition en 360° – ©Stéphane Mahé

Un jeu d’oppositions

Le dialogue entre les pratiques des cinq artistes passe, en partie, par un jeu d’oppositions : l’abstrait se confronte à la figuration, la couleur au noir et blanc, le très petit format au gigantesque dessin, le paysage à la figure, …

Seulement, dans les œuvres elles-mêmes, on peut également trouver ces contradictions. C’est le cas chez Denis Orhant et Angélique Lecaille, dans lesquelles l’abstrait flirte avec le figuratif, tant et si bien qu’il est parfois difficile de discerner la figure ou la forme du fond. Les rapports d’échelle sont également à l’œuvre chez ces artistes, ainsi quand dans certains dessins de Pascale Borrel où le minuscule motif se répète à l’infini pour coloniser ou s’insérer dans l’aplat coloré. D’ailleurs, les couleurs et les nuances sont parfois complémentaires ; l’artiste joue ainsi sur un rapport d’échelle et sur la complémentarité de la couleur.

Passé et présent

Les oppositions que comptent les travaux exposés ne sont pas seulement formelles : certaines œuvres comportent en elles-mêmes des contradictions fortes en raison des références qu’elles convoquent. On peut citer le travail de Bruno Di Rosa et celui de Jérémy Le Corvaisier. Si le premier ne s’est pas toujours penché sur la question de l’image, il revisite dans la série exposée l’icône religieuse. Bruno Di Rosa en emprunte les codes avec ces fonds dorés, mais le Christ et les madones ont cédé leur place à des figures rarement mises en avant. Sans-abris et migrants flottent, fragiles, sur ce décor vide qui rappelle plus les supports de pâtisserie de Noël que l’icône religieuse.

Jérémy Le Corvaisier quant à lui, convoque des références à l’histoire de l’art classique, à l’école flamande ou au réalisme du XIXème. L’artiste reprend les compositions de Jean-François Millet et de Pieter Bruegel, par exemple, pour dessiner des scènes parfaitement actuelles comme le vol d’un sac à main ou une bagarre devant un restaurant asiatique. Certaines scènes s’inspirent de la pop culture, les personnages eux-mêmes ont les traits de Conan le Barbare ou des acteurs bodybuildés des années 1970/1980.

Un hors-temps

Plusieurs temporalités se côtoient dans l’espace d’exposition, et les jeux d’oppositions, qu’ils soient formels où dus aux références convoquées par les artistes, créent une ambiance quasiment hors du temps. Les différents travaux se répondent en ce sens, et les figures représentées par Bruno Di Rosa et Denis Orhant semblent flotter, figées, dans un hors temps. Les visages de Pascale Borrel eux-mêmes sont désincarnés, ils ne sont plus que masques sans limite, surplombant la salle d’exposition sans vraiment être présents.

L’œuvre d’Angélique Lecaille illustre d’ailleurs très bien cette notion. Ses dessins, qu’ils soient monumentaux ou non, s’intéressent à la rencontre entre la matière naturelle, souvent minérale, et l’action humaine. Principalement réalisées par soustraction, ses œuvres présentent des paysages vides, dans lesquels l’homme est à la fois présent, par les structures monumentales qui ne peuvent être naturelles, et absent puisqu’on ne le voit pas. Les lieux sont déserts. Entre architecture SF et ruines romantiques, ces scènes semblent figées dans un hors-temps où même les nuages sont immobiles. Ils invitent à la contemplation, on se retrouve alors seul face à eux, rappelant ainsi le titre de l’exposition.

Solitude ?

Les figures représentées, quand elles ne sont pas totalement absentes, semblent muées d’une solitude qu’elles partagent avec les artistes au moment de la création. Ces derniers, pourtant, ne sont pas toujours seuls. Ils se connaissent, échangent en amont ou en aval de leur travail, à propos de ce dernier ou non. 

« Chacun ici a fait son travail de son côté, en se connaissant pour certains, pour d’autres sans se connaître véritablement ou du tout. »2

C’est là toute l’essence du titre de cette exposition. Si les artistes, de manière générale, sont seuls au moment de la création, le sont-ils vraiment en réalité ? De même, ces univers qui se croisent dans l’espace d’exposition ne sont pas hermétiques aux autres, bien au contraire. 

Chacune des pratiques présentées a sa cohérence propre, les travaux de ces artistes pourraient être présentés indépendamment les uns des autres, cependant, leur cohabitation en une même exposition leur permet de se renouveler, on les voit sous un nouveau jour.

« C’est bien de les avoir fait se rencontrer. » 3

 

  1. Denis Orhant, à propos de l’exposition « Comme seul »
  2. Idem
  3. Idem

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Prises de vues de l’exposition ©Stéphane Mahé

À PROPOS DES ARTISTES

Les cinq artistes vivent et travaillent à Rennes. Du fait de leurs activités, ils sont très impliqués dans la vie culturelle de la capitale bretonne et installent aujourd’hui leurs œuvres à Cesson-Sévigné.

Denis Orhant, est à la fois artiste et professeur au département Arts Plastiques à l’Université Rennes 2 où il enseigne, entre autres, la peinture. Après avoir étudié lui-même la peinture à l’École des Beaux-Arts du Mans, il s’installe à Rennes pour continuer sa formation auprès de Pierre Antoniucci. Denis Orhant est peintre avant tout, mais il a également une pratique sculpturale, selon un procédé de collage.

Échange avec Denis Orhant

Pascale Borrel, dans ses œuvres, fait le choix du retrait. Cela lui permet de trouver un équilibre, de résoudre l’équation entre la production artistique et l’enseignement, car l’artiste est également maître de conférence à l’Université Rennes 2 où elle enseigne au département Arts Plastiques. Elle est titulaire d’un DNSEP et d’une thèse de doctorat en Arts plastiques intitulées Neutre.

Angélique Lecaille, particulièrement impliquée dans la vie artistique rennaise, a enseigné et enseigne toujours dans plusieurs écoles et universités. Nombreux sont ses dessins, mais Angélique Lecaille travaille également en volume. Son intérêt pour les images médiatiques, mais surtout pour le paysage (la montagne, les nuages, les ruines, l’architecture…) la pousse à dépasser l’image pour la rendre atemporelle.

Bruno Di Rosa a une pratique artistique aux multiples facettes. Se décrivant comme «écrivain/plasticien», l’artiste travaille avec des supports variés tels que l’écriture, le cinéma, la photographie ou entre la peinture. Chacun de ses œuvres interroge pourtant la frontière entre le réel et l’irréel, car Bruno Di Rosa reprend les codes de chacun de ces supports, allant jusqu’à recopier l’œuvre d’un autre, semant ainsi le trouble dans l’esprit du spectateur.

Jérémy Le Corvaisier, né en 1981, auteur de BD et illustrateur, développe aujourd’hui un travail à la mine de plomb où l’étrange et le banal se mélangent aux grandes compositions de la peinture flamande et classique. Après avoir notamment travaillé pour Inrocks, il se lance à présent dans un univers en noir et blanc aux figures rappelant Conan le barbare. Son dessin est à la fois inquiétant, mystique et narratif.

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Infos pratiques 

Du lundi au vendredi, de 9h à 12h et de 14h à 17h15.
Pour réserver un créneau de visite, merci de nous écrire à l’adresse contact[at]ailesdecaius.fr
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60 A rue de la Rigourdière – 35517 Cesson-Sévigné
Tél : 02 99 22 77 99

Bus n°67 – arrêt Champelé
Bus C6 – arrêt Rigourdière

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